ALPHONSE DU GROS CAILLOU.

J'm'appell' alphons', j'n'ai pas d'nom de famille,
Parc' que mon pèr' n'en avait pas non plus,
Quant a ma mère, c'était un' pauvre fille,
Qui était née des parents inconnus.
On l'appelait thérès', pas davantage.
Quoiqu'non mariés, c'étaient d'heureux époux;
Et si l'on disait quel beau petit ménage, }
Que le ménage Alphons' du Gros Caillou! }(bis)

Après trois ans, ils eur'nt enfin d'la chance,
vu leur conduit', leurs bons antécédents,
D'pouvoir ouvrir un' maison de tolérance.
Et surtout celle d'avoir eu quatre enfants.
Sur quatre enfants, Dieu leur donna trois filles,
Qui ont servi dès qu'elles ont pu chez nous;
C'est que c'était une honnête famille, }
Que la famille Alphons' du Gros Caillou! }(bis)

Tout prospéra, mes soeurs aidant ma mère,
Car elles eur'nt vite fait leur chemin;
Moi-même aussi, et quelque fois mon père,
S'il fallait, nous prêtions la main.
La clientèle était assez gentille,
Car elle avait grande confiance en nous;
Ils s'en allaient disant: quelle famille }
que la famille Alphons'du Gros Caillou! }(bis)

Moi j'travaillais à la magistrature,
Le gros clergé, les gros officiants.
J'avais pour ça l'appui d'la préfecture,
Où je comptais aussi quelques clients.
J'étais si beau qu'on m'prenait pour une fille,
Tant j'étais tendre et caressant et doux,
Aussi j'étais l'orgueil de la famille }
De la famille Alphons' du Gros Caillou! }(bis)

Y avait des jours fallait être solide,
Et le quinze août, fête de l'empereur,
C'était chez nous tout rempli d'invalides,
De pontonniers, d'cuirassiers, d'artilleurs;
Et tous ces gens sortaient contents d'chez nous;
Ils se disaient: quelle belle famille, }
Que la famille Alphons' du Gros Caillou }(bis)

Au dehors nous comptions quelques pratiques,
Ma mèr'servait les dam's du sacré Coeur,
Mes soeurs servaient Madam'de Metternich.
Mon père servait la maison de l'emp'reur.
La clientèle était assez gentille,
Puis on avait grande confiance en nous,
Et l'on disait: -Quelle sainte famille }
Que la famille Alphons'du Gros Caillou! }(bis).

Mait'nant ma mèr' s'est r'tirée des affaires,
Moi j'continue... Mais c'est en amateur,
Mes soeurs ont tout's épousé des notaires,
Mon père est membre de la légion d'Honneur,
De notr'vertu la récompense brille,
Et si notr'sort a pu fair'des jaloux,
On dit tout d'mêm', c'est une belle famille, }
Que la famille d' Alphonse du gros caillou. }(bis)